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ALBUM CONFUSION 1




APPARTEMENT 2e

C’est la débandade / J’ai cassé la chaise / J’en ai plein le crâne / D’habiter ici
Dans ce bref appart / Petit comme un lit / Tout est dérapage / On sent les conserves
Coincées sous la table / Comme une collec / De non recyclage / De métal vieilli
Les journées s’entassent / Le toit s’alourdit / Je n’ai pas compris / Les murs ont jauni. 

Nez dans le cirage / Je fais l’inventaire / D’un maigre salaire / D’une envie de vie
Plus ensoleillée / Plus spatiale aussi / Plus alimentée / Des fruits du verger
J’ai pas un radis / Et la ville encore / Chante les sirènes / Contre les remords
Et je m’y démène / Dans ses lieux d’ardoises / Lieux qui me ramènent / Sous ce toit réduit. 

J’ai grimpé les marches / Des mille et une nuits / Et par la fenêtre / J’aurai bien fini
Une soirée morose / Un appétit mort / Un accord trop fort / Avec l’harmonie
Mais dès aujourd’hui / C’est bientôt fini / J’ai fait l’inventaire / Les murs ont vieilli
Il faut changer d’air / Ou moisir ici / Car dans la poussière / J’ai un peu jauni.






VAISSELLE

Je sais / Faire la vaisselle / La vaisselle / Je sais la faire
Avant / Pour cuisiner / Je faisais la vaisselle / (Je sais la faire)
Pour la vaisselle / Je lavais l’évier

Depuis / La vaisselle / Je la fais après manger
Quand j’ai faim / C’est déjà ça de gagner
Car pour manger / La vaisselle / C’est mieux

Ce qui est fait / N’est plus à faire
Sauf la vaisselle / Faut la refaire / Et ça s’arrête jamais

Et pour manger / Faut cuisiner / Faut faire les courses
Si en plus / Y’a la vaisselle à laver / J’ai plus faim.









CONFUSION 1

Confusion 1 / Je ne sais pas qui je pleure
Confusion 2 / Je ne sais pas si c’est la fatigue
Question 1 / Comment peut-on mourir si vite ?
Question 2 / Faut-il pleurer ?
Réponse 1 / C’est mieux que l’agonie
Réponse 3 / La mort concerne ceux qui restent
Diffusion 1 / La tristesse
Confusion 1 / Le deuil
Diffusion 2 / La tristesse des autres
Confusion 2 / Le deuil des autres
Conclusion 1 / Ils sont morts
Conclusion 2 / Nous sommes vivants
Question 3 / Jusqu’à quand ?
Réponse 2 / Il faut vivre








PETITE FILLE BRULÉE

Elle tenait à la main / Sa sœur / Avec avidité
 Ou alors qui était-ce / Elle-même / A l’âge des poupées ?
Et elle semblait si fière / D’elle-même / En souriant dans l’entrée
Elle avait fini par / Finir / Ce qui la démangeait

Ce qui la démangeait / Elle-même / Petite fille brûlée
En tenant ses cheveux / Frisés / Elle l’avait pour trophée
La gamine de chair / Elle l’avait dégustée
Et elle semblait si fière / Du corps décortiqué

J’étais sur le palier / Je venais de sonner
J’ai quand elle a ouvert / Découvert le squelette
De la petite fille / Bouffée par les années
Bouffée par son aînée / Qui souriait dans l’entrée
Et qui semblait me dire / Qu’elle était affamée
Et qu’elle voulait sortir / Pour croquer un quartier

Si elle gagnait l’air libre / Petite fille brûlée
Elle irait se remplir / Jusqu’à la satiété
Elle mettrait en péril / Après avoir rongé
Sa grande moralité / Les amis du quartier

Il fallait la garder / Petite fille à lier
Alors je l’ai poussée / Je l’ai barricadée
Et j’ai goûté son air / Son appétit vrillé
J’ai dégrafé sa chair / Et je l’ai dégustée
C’est là qu’elle a aimé / Petite fille brûlée
Quand moi je l’ai aimé / Son corps décortiqué

Il fallait la garder / Petite fille grillée
Et je l’ai distillée / Jusqu’à la satiété
Il fallait tempérer / Son envie de brûler
Alors je l’ai éteinte.






CANAPÉ

Allongé / Dans le canapé / Devant le télé éteinte
J'ai laissé tomber / Dans ma tasse de thé / Un demi-citron
Allongé / Dans le canapé / J'étais détendu
Le demi-citron / A rempli mon thé / De pesticides

Ça m'énerve / Dans le canapé / Je voulais soigner ma muqueuse
C'est raté / J'ai le nez qui siffle
Je finis mon thé / Dans le canapé / J'ai la tête qui tourne
Les pesticides / C'est comme le cancer

J'étais détendu / Dans ma tasse de thé / J'ai laissé tomber un citron
Et à force d'attendre / J'ai des courbatures
Je finis mon thé / Dans le canapé /J'ai la tête qui tourne
On peut vivre longtemps dans un canapé / On peut mourir dans un canapé.





RADIATEURS 


Coule, l’eau des radiateurs
La maison flanche
Natale, la maison blanche

Cours, foule disparue
Rendue aux extérieurs
Ici le vide côtoie le bruit des radiateurs

Joue, dehors, aux jours des autres
La nuit habite l’abri sans œuvre
Et même les gargouillis s’éteignent
Ils reviendront


Ne reviens pas trop vite
Je me réjouis de vos absences
En aspirant le temps fini

Ici les dernières heures sont à moi
Il n’y a aucune altérité
Aucun froissement
Aucune fissure
Sauf celles des murs qui témoignent
D’une nostalgie sourde.





JE JOINS LES BOUTS


Je joins les bouts…
Et toi
Tendre et physique
Tu vas où ?

Tu m’as couvert
De baisers
Alors…

J’irai jusqu’à l’aube…
(J’ai bu jusqu’à l’aube…)


J’ai trouvé
Sur ta bouche
Le sourire

Sur ta bouche
J’ai senti le mien

Pour l’instant
Tendre et physique
  Ça peut durer…

Pour l’instant
Je joins les bouts…





SOUS LA PLAGE LA COMMUNE


Extirpé du désert / Du côté de la vie / Extrait de la fameuse / Catégorie
Du premier quart de siècle / Et sa mort volontaire
Fini le premier quart / Et sa mort volontaire / Sa faux est plus véloce / Qu’un virage enfoncé
Continue la chaussée / Vers les contrées joyeuses
Doux pays de nos frères / Égaux et solidaires / Doux pays de puissance / La puissance qui s’exporte
Et glisse entre les lignes / Dassault et Lagardère
Qui fléchit la cervelle / Et lui conte l’histoire / C’est du prêt à penser / Elle est déjà mâchée
La partie est jouée / C’est comme ça qu’elle s’est jouée…


Un direct du gauche / A-t-on déjà vu ça ? / A part à la Commune / Enterrée sous la plage
Sous la plage la Commune / Et dessus tous ses morts
C’est du prêt à penser / L’ultime garantie / Qu’il faudra préserver / Micros sous le parquet
Si seulement ça faisait / Un peu vibrer les planches
Le pays prolifère / Il irradie son monde / Bel esprit d’équité / On devrait s’enliser
Tous avec le sourire / Et vivre en liberté
Le slogan est sexy / Et les concepts creux / C’est toujours plus facile / Pour communiquer
Y’a rien à expliquer / Il y a juste à comprendre
Se remettre au travail / Voilà ce qu’il faut faire / Mais tous les Communards / Ils voulaient travailler
Ils sont tombés quand même /Par dizaines de milliers
Se remettre au travail / La belle perspective / En a pris pour son grade / A tirer vers la bas
Le travail est déçu / Il est comme consommé


Extirpé du désert / Du côté de la vie / Extrait de la fameuse / Catégorie
Du premier quart de siècle / Et sa mort volontaire
Fini le premier quart / Et sa mort volontaire / Sa faux est plus véloce / Qu’un virage enfoncé
Continue la chaussée / Vers les contrées joyeuses
Doux pays de nos frères / Égaux et solidaires / Doux pays de confiance / Micros sous le parquet
Sous la plage la Commune / Et vive la liberté !
Mais voici qu’au milieu / La troisième décennie / Offre un nouveau désert / Une tranche suicidaire
Jusqu’à la soixantaine / C’est le prix de la paix.



VÉNUS 


J'appartiens au système / Auquel elle appartient / Et où chacun palpite / Autour d'un feu
J'appartiens au système / Auquel elle appartient / Et où chacun gravite / Autour d'un sein
J'appartiens au système / Elle indique le Nord / Je la mange des yeux / Et m'y fie
La prenant pour déesse / A l'aube ou à l'aurore / Je lui jette des vœux / Ça se suit

J'appartiens au système / Auquel elle appartient / Et j'ai trouvé un sein / Qui palpite
J'appartiens au système / Auquel elle appartient / Elle a trouvé un feu / Qui s'agite
Sa chevelure épaisse / Ses brumes tempétueuses / Me font perdre la tête / Je vais au Sud
Sur ma belle déesse / Me frotter à son feu / Prendre le tourbillon / Le double


J'appartiens au système / Auquel elle appartient / Et j'ai trouvé un rein / Qui m'habite
J'appartiens au système / Auquel elle appartient / Et j'ai trouvé du grain / A moudre
Car au jour elle est prise / D'un coup de plomb dans l'aile / L'horloge vénusienne / Est tout autre
Ma colombe chérie / A repris ses affaires / Pour révolutionner / A l'envers

J'appartiens au système / Auquel elle appartient / Son manège m'enchaîne / Au décor
Je connais le système / Mais dans son plan d'ellipse / J'ai perdu mes abords / J'ai pris un grain
Dans le jour qui s'étire / Qui me pousse aux enfers / Son humeur vagabonde / A deux faces
Lucifer ou Vesper / Je ne sais qui des deux / M'a filé ses ulcères / Ça craint


J'appartiens au système / A ma belle déroute / Qui a donné du corps / A la joute
Elle belle Vénus / J'eus été un peu plus / J'aurais pu batailler / Des années
Pour conquérir le cœur / De sa fière hérésie / Arpenter ses rondeurs / Hystériques
Tous les soirs et matins / Goûter encore au Sud / Prendre le tourbillon / Le double

Que ne suis-je un peu plus / La colombe est partie / J'appartiens au système / Au sien
Tous les soirs et matins / Je la cherche des yeux / Elle attise mon feu / Ça brûle
J'appartiens au système / Elle anime ma sève / Et malgré sa figure / Changeante
Même si Lucifer / S'inclut dans la partie / J'irai encore au Sud / Perdre le Nord.





BALLE NEUVE


Elle est dans ton camp
Tu m’as épuisé
C’est le dernier jeu
Il est décisif

Malgré les effets
On joue sans filet
Et au fond du court
On plie sous les crampes

On passe en revue
Tous les coups vicieux
Je prends la volée
T’as franchi la ligne

Là voilà enfin
La victoire à l’un
Et l’effort de l’autre
Réduit à rien.








L’ALARME


Je suis une alarme et j’irai chier devant chez vous
Je monte la garde, je monte la garde
Je suis une alarme et j’irai chier devant chez vous
Je monte la garde, je monte la garde

J’ai perdu mon grade en allant chier devant chez vous
Je suis une larme, je suis une larme
J’ai perdu mon grade en allant chier devant chez vous
Je suis une larme, je suis une larme

Et j’entends d’ici un nouveau chien qui reste en joue
Qui est une alarme, qui est une alarme
Et j’entends d’ici un nouveau chien qui reste en joue
Qui est une alarme, qui est une alarme

Je suis une alarme et j’irai chier devant chez vous
Je monte la garde, je monte la garde
Je suis une alarme et j’irai chier devant chez vous.









DESCENTE

C’est sale ici / Faudrait descendre les poubelles / Les débris
Il les met / Dans le conduis / Jusqu’à l’obstruer
Maintenant / Dans le conduis / Il faut descendre
Il descend...

Il dégage / Les poubelles / Les débris
Il salive du charbon / Il avale
Les poubelles / Les débris
Il descend / Couvert de suie...

Pour remonter faudrait lui passer la corde
Mais au fond y'a peut-être de quoi rire
Il manifeste son envie de descendre
Et digère les poubelles...





BARILLET


En haut / Tout en haut de la tour
Jaloux / Des lumières de la ville
En haut / Des années qu’il hiberne

En peine / Il se montre aux fenêtres
Vertige / La mâchoire serrée
Se penche / Par-dessus le balustre


En bas / Tout en bas de la tour
Il voit / Marchant sur le trottoir
Des gens / Dans le flux de la ville

Pour lui / Des années qu’il hiberne
Les dents / La mâchoire bloquée
Il suit / Les élans de la foule
Et tourne / Le barillet


En bas / Les lumières de la ville
En bas / Dansent les gyrophares
En bas / Tout se désarticule…

Sur lui ou sur un autre / Il a fallu tirer
Les siennes ou celles d’un autre / Il rêvait de viscères
Pour lui ou pour un autre / Des années qu’il tournait
Le barillet, le barillet, le barillet.








CAMILLE


J’étais un peu loin quand tu es venue dans tes rubans blancs
J’étais un peu loin et je t’attendais depuis quelques temps
J’étais un peu loin mais j’ai aperçu ton profil voilé
Voile de mariée qui va s'amuser à le chiffonner

Je l’imaginais, la fraîcheur maligne de tes fossettes
A conquis les rangs, tissant son empire jusqu’à moi
J’étais au milieu, la foule vouée à l’adoration
Tu glissais dessus pour m’enrubanner à mon tour

En dépit des autres tu m’as engagé à chanter
Et ton diapason résonnait en moi à l’envi
Là c'était nouveau, j’étais partisan de l’unisson
J’étais un maillon consentant à suivre les ordres

Je suis ton public, je suis dans ta foule et ton giron,
Quand il est venu se glisser dessous j’ai aimé
J’aime ton fessier lorsqu’il se trémousse à l’arrière-scène
Je ne dirai pas je suis une fille

Je ne suis pas fille, ne suis pas non plus la belle Camille
Mais suis attiré dans ton univers comme un chien câlin
J’aime ta folie et tes chansonnettes sont douces pastilles
Je n’aime autant pas quand tu fais la chienne et qu’on jappe

Quand il a lancé ton exécutant un léger "salope
Ça m’a fait marré et ça révélait quelque chose au fond
De spectaculaire, de l’exhibition de ta libido
D’offrande à la masse en gage de quoi rémunération

Je ne suis pas fille et j’ai bien aimé quand il est venu
Ton cul profiler à l’arrière-scène ses lignes dansantes
J’applaudis longtemps ton passage ici comme un chien baveux
Où je t’ai mariée pour un court instant en un doux fantasme.






OCTOBRE


C’est un bruit familier / Dans une nuit d’octobre / Est-ce toujours le même ?
Je croyais l’avoir tué / Il aura échappé / A tous les coups
Depuis quatre semaines / L’été qui s’éternise / Il se saoule à mes veines
Il perdure à l’automne / Il grossit / Il s’alourdit


Sur la peau j’ai la trace / Le signe péremptoire / De la démangeaison
Je pense à l’anophèle / A l’Afrique aux tropiques / Je m’enduis de produit
Pour déjouer la menace / Repousser la piqûre / J’aimerais avoir froid
Et regagner l’hiver / Qu’il arrive en douceur / En novembre


Mais ce bruit familier / Dans la nuit de novembre / Est-ce toujours le même ?
Je croyais l’avoir tué / Il aura échappé / A tous les coups
Depuis bientôt deux mois / L’été qui s’éternise / Il se saoule à mes veines
Il perdure à l’automne / Il grossit / Il s’alourdit


Quand il aura tout pris / Il sera ballasté / Je pourrai l’épingler
Car pour passer l’hiver / J’aurais préféré mettre / Un manteau
Je continue aussi / Je m’enduis de produit / Dès qu’il sera servi
J’écraserai aux murs / Son corps comme un augure / Aux nouvelles saisons. 






COMME SI LA VOIE LACTÉE ÉTAIT TOMBÉE


Comme si la voie lactée était tombée / Ils marchent sur la plage au milieu des tessons
Ils les foulent et leurs pieds au contact du verre / Font comme du rouge à lèvres / Sur la pierre
Ça lui donne un sourire / Elle est un peu moins sèche

Sur la plage de galets ils rejoignent la mer / Le soleil au zénith
Cogne comme une enclume et traversant la brume / Blanchit le littoral
On n’entend pas grand-chose / D’autre que les grincements / Le verre et les galets sous leurs pieds…


Le rouge sur la pierre s’est déjà obscurci / C’est l’unique contraste
La blancheur les écrase et les fait disparaître / Ils avancent / Vers l’océan
Comme les dernières ombres

Mais les vagues qui avant glissaient sur le rivage / Se sont taries
Et les pieds déchirés pourront toujours marcher
La mer s’est effacée / Elle s’est évaporée / Il n’y a plus que du sel, une blancheur aveuglante...


Le soleil au zénith finit par les brûler / Ils s’affalent
Ils ramassent des cailloux pour saliver
Crachent du sang

Sur l’ancien littoral la couleur reprend / La plaine de cristaux
Qui confondait le ciel en brûlant l’horizon

Sur l’ancien littoral la couleur reprend
Sur l’ancien littoral 
Afflue
Un nouvel océan.







YASUKO


Ils ont tué Yasuko
L'éclair
L'éclair continue

Elle était pourtant loin
Loin de l'épicentre
Sur la mer du Japon

Ils ont tué Yasuko
Sur la mer Jaune
Elle a pris la pluie noire.